Introduction

   n°29: Bibliographie des ouvrages publiés par la mission mariste des îles Salomon
  P. O'Reilly et H. Laracy. Paris, 1972, Prix: 70 F; 10,67
           On reste surpris de voir l'ampleur de l'effort culturel que se sont imposés les missionnaires maristes des îles Salomon pour fixer les langues de ces îles, les enseigner, instruire leurs fidèles au moyen de publications qui, périodiques ou épisodiques, modestes ou importantes - elles vont des abécédaires d'une page aux plus gros livres liturgiques - sont en fait les incunables de ces îles, passées en quelques années d'une civilisation orale à une culture où triomphe l'imprimé. Plus de 200 titres commentés avec l'histoire es imprimeries locales. Une contribution à l'histoire de la presse en Océanie.

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INTRODUCTION (retour)

 La première tentative d'évangélisation des îlesSalomon par une mission catholique remonte à 1845. En moins de deux ans,l'essai de Mgr Epalle, marqué de plusieurs morts violentes, se soldaitpar un échec et un abandon. Il fallut attendre plus d'undemi-siècle - cinq ans après la déclaration du Protectoratanglais sur les îles en 1893 - pour que les Maristes de Fidji, sousl'instigation de Léon XIII, songeassent à reprendre latâche abandonnée par la première générationde pionniers. En mai 1898 la mission prenait pied à Rua-Sura - les deuxSura - îlots inhabités de la côte Nord de Guadalcanal. C'estlà qu'on s'installe avec quelques catéchistes fidjiens. C'estlà qu'on attire les travailleurs-écoliers qui deviendront lespremiers éléments de la mission. Avec eux on apprend la langue.C'est là que sera fondée une école de catéchistes.On a un bateau. On fait des voyages " d'exploration ". Ainsi secréent peu à peu un certain nombre de stations sur l'île deGuadalcanal : Avu Avu, en 1899; Tangarare, en 1900, dont la langue, le dialectede Gare, va devenir la langue diffusée par la mission; Visale et Marau,en 1904. L'année précédente, le Père Bertreux aété nommé Préfet apostolique de la mission. En1909, la mission passe à San Christoval, où la station àWanoni Bay est fondée. En 1912-1913, c'est Malaita qui esttouchée, où les stations de Rohinari et de Buma sontfondées sur la côte est de l'île. Tous cesétablissements créaient des obligations d'enseignement, desproblèmes scolaires; et les écoles, celui des livres. On setourna tout d'abord, comme naturellement, vers la mission mère, celle deFidji, qui possédait une imprimerie. Et le premier volume en langueGare, un catéchisme précédé d'unabécédaire, sera tiré à Levuka, sur les presses dela mission de Mgr Vidal. On regarda ensuite vers Sydney. Au début dusiècle, les navires de Burns Philip et ceux de Lever Brothers touchaientl'archipel une quinzaine de fois par an. C'était à Sydney,où était installée la Procure mariste, que lesPères allaient se soigner. En 1905, le Père Bouillon,envoyé à Sydney pour raisons de santé, en revenait avecdeux petits ouvrages imprimés sur place, destinés à lamission de Tangarare. Cinq ans plus tard, le préfet apostoliquedépêchait le Père Raucaz dans la capitale australienne. Ilavait mission d'y faire imprimer une Histoire Sainte. En même temps lePère Raucaz devait effectuer un stage à l'écoleprofessionnelle des Frères maristes, à Westmead, pour y apprendrele métier d'imprimeur. Le Père Raucaz revint aux Salomon septmois plus tard, s'étant initié là bas à lacomposition et au tirage. "He brought with him a Platen Machine, type,etc. everything sufficient to make a start. On his arrival at Rua Sura, wherehe was appointed superior at that period, he set to work to install the machineand to compose the first work printed in the Solomons. This press was the firstin these islands. " Avant la fin de l'année 1910, avec le concoursde jeunes indigènes formés à la manœuvre de lamachine, une imprimerie était en mesure de fonctionner à RuaSura. La première œuvre qui porte le label " Catholic Mission,Rua Sura ", est une brochure de 8 pages intitulée Na tsigooianaJesu Kristo ta na Ukaristia. Un calendrier pour l'année 1911 ne devaitpas tarder à voir le jour. Enfin, dès janvier 1911, la missionlançait un périodique, Na turupatu, " les Nouvelles ",qui devait connaître une belle carrière. Ces publications, aussimodestes qu'elles peuvent nous paraître, apparaissent dans les Salomondes années 10 du siècle comme un " événement" pour les indigènes vivant dans la mouvance de la mission. Chaqueparution était attendue. Le Père Raucaz avait vu juste. Les deuxpériodiques qu'il lançait témoignaient, à leurmanière, de l'allant de la mission catholique, et découvraientà ces hommes d'une civilisation de la parole le monde, nouveau pour eux,de la pensée écrite et de l'imprimerie. Le Père Raucaz quidevait, en 1920, prendre la succession de Mgr Bertreux comme vicaireapostolique, mérite bien d'être appelé le fondateur del'imprimerie de la Mission. Le hasard veut que deux excellentes photographiesprises à la fin de 1910 nous aient conservé l'image du premieratelier d'imprimerie des îles Salomon. Elles nous présentent lePère Raucaz et le salomonais Samuel dans l'atelier construit àRua Sura. L'une nous montre la machine à plateau; l'autre le coin de lacomposition avec les casiers contenant les différentes polices decaractères. Samuel figure dans les deux clichés. S'ilpossède un pagne, maintenu par une ceinture de cuir, deux signesévidents d'un stade fort évolué, il a encoreconservé son collier en dents d'opossum agrémenté, dans ledos d'une brasse de monnaie indigène, et son oreille gauche s'orne deboucles d'oreilles en coquillages. Le Père Raucaz quittait Rua Sura en191l, nommé à Rubiana. C'est alors qu'apparaît dansl'histoire de la mission le célèbre Brother George, qui trenteannées durant, allait devenir l'imprimeur de la mission. George RichardDwyer est un Australien de Newcastle, qui, après des études chezles Maristes, demande en 1911 à servir la mission des Salomon du Sudcomme auxiliaire laïc. A ce titre il passe quelque temps à RuaSura. Le Père Raucaz, qui a reconnu ses qualités dechrétien généreux, d'homme ordonné, et d'habilemécanicien, aura vite fait d'affirmer sa vocation missionnaire et de luitirer l'horoscope des imprimeurs... Et de fait, sur place, George Dwyer sedécida de consacrer sa vie au service de la mission. Les Pères,qui l'ont vu à l'œuvre, avaient apprécié sacollaboration. On l'envoya au début de la première guerremondiale à Grenmeadows, en Nouvelle-Zélande, où il faitson noviciat avant de regagner les Salomon. La presse installée par lePère Raucaz se trouvait située à Rua Sura. C'est làque le Frère George commença à travailler. Une despremières décisions prises par Mgr Raucaz, après sanomination comme Vicaire Apostolique, sera de transporter le centre de laMission de Rua Sura à Visale. L'imprimerie suit. Et le Brother Georgecontribue à l'installation de la station de Visale. Mgr Raucaz aconservé un coin du coeur pour l'imprimerie qu'il a créée." Lors de son voyage à Sydney pour sa consécrationépiscopale, il acheta sur place une machine Wharfedale, pour faciliterl'impression des livres et des clichés, ainsi qu'une machine àbrocher et une presse à épreuves. A son retour son premier soinfut de faire agrandir l'imprimerie, à Rua Sura, pour recevoir cettegrosse machine. Lorsqu'elle arriva, elle était en piècesdétachées. Aucune notice, aucun plan de montage nel'accompagnait. Mgr Raucaz et le bon Père Bouillon me donnèrentun coup de main pour mettre toutes ces tonnes de ferraille en état demarche. Ce ne fut pas facile. Nous y passâmes plusieurs semaines d'untravail acharné. Enfin tout fonctionna... Ce fut alors que le courriernous apporta plans et notices qui nous eussent évité bien destâtonnements! ". Et le Frère d'ajouter, dans la lettre de1935 où il raconte cette aventure : " lors du transfert del'imprimerie de Rua Sura à Visale, l'évêque eutl'idée d'une heureuse amélioration. Il me fit capter une chuted'eau, qui permit l'installation d'un moulin à eau, chargé defaire marcher la presse. Ce canal d'alimentation nous évitera bien despeines et bien des impatiences. " Toujours dans cette même lettre de1935, revenant sur ses souvenirs d'imprimeur, le Brother George, ajoutait :" J'ai peut-être oublié de vous signaler que le bonPère Bouillon fut jusqu'à sa mort notre censeur et notrecorrecteur d'épreuves. J'ai reçu de lui une aide précieuseet de nombreux encouragements... C'est maintenant de mon devoir de maintenirles bonnes traditions de cette imprimerie et de mener à bienl'œuvre de mes prédécesseurs. " A ses fonctionsd'imprimeur, le Frère George joignait aussi celles d'ingénieurélectricien. " Peu avant sa maladie, l'évêque mechargea de l'Electric Light Plant et de l'entretien des différenteslignes. Naturellement toute la machinerie [dynamos, transformateurs etaccumulateurs] est abritée sous le même toit que l'imprimerie, sibien que je puis tout surveiller sans difficultés. Le soin des appareilsélectriques fait aussi de moi un opérateur de cinéma. Nousavions déjà une bonne série de films. Ceux que vous nousavez récemment fait parvenir [il s'agissait sans doute de films surFidji, la Nouvelle-Calédonie, et les Salomon, dont le R. Père L.L. Dubois, assistant pour les missions, avait assuré le tournage, lemontage, l'édition et aidait la distribution] sont une notable additionà notre collection de 44 films, tous aussi intéressants pour lesindigènes que le jour de leur arrivée ! ". Lesprocédés audiovisuels les plus modernes étaientutilisés aux Salomon bien avant la seconde guerre mondiale ! "J'eus l'occasion, écrira le P. O'Reilly, de faire la connaissance duFrère George lors d'un rapide passage à Visale en 1934. Je pusainsi recueillir sur place des abécédaires, des tableaux delecture, des feuillets consacrés aux chiffres et aux quatreopérations auxquels, dans la suite jamais le Frère George ne feraallusion. Ils témoignent qu'à côté des "travaux de labeur " dont il s'honorait, il a dû imprimer de nombreux" bilboquets ", qu'il devait considérer comme " travauxde ville " et ne pas compter dans ses statistiques. Nous restâmes enrelations par la suite. En février 1935, le Turupatu en fait foi, ilcélèbre les noces d'argent des presses de la Mission. A lamême date, il écrit avec humour à Rome, au Père L.L. Dubois - " Cette année, je serai plus occupé que jamais :quatre livres à faire paraître. Tous dans des dialectes quej'ignore. Je suis au moins sûr de ne pas perdre mon temps en lisant lesmanuscrits ! ". Le 26 août 1939 il m'envoyait 26 de ses plusrécentes publications. Malgré la guerre, les trois colis finirentpar me parvenir. " C'est bien regrettable, m'écrivait-il àcette occasion, que je n'ai pas su plus tôt votre désir deconserver par devers vous, à Paris, les impressions de Visale. C'est unpeu tard maintenant. Il m'est bien difficile de retrouver certaines plaquettes.Malgré tout, j'ai eu la chance de trouver encore des exemplaires despublications du Père Bouillon. En tous cas, je garde la liste de ce queje vous envoie. Et dorénavant... " Hélas ! la guerre dans lePacifique et la présence des Japonais aux Salomon devait laisser sanssuite cette proposition. En 1942 le Frère George évacuait lesSalomon. Il ne devait revoir les îles qu'une fois la paix revenue. Il nerestait naturellement plus rien de la Mission de Visale et de son imprimerie ;la prise du champ d'aviation de Henderson Field, à Guadalcanal, ayantété une des plus dures opérations de la guerre dans lePacifique. Le 9 janvier 1947, le Frère écrivait à Rome" Je suis de nouveau dans les îles de mes rêves aprèsun long exil de près de trois ans et demi. Pas besoin de vous dire queje suis bien installé, dans le nouveau quartier général dela Mission, juste en dehors des limites d'Honiara, notre nouvelle capitale.J'ai repris mon ancien travail d'imprimeur et de procureur. Monseigneur m'amême donné le titre de Procureur-assistant! Pendant de nombreusesannées, j'avais assumé cette charge sans avoir reçuofficiellement le portefeuille de ma fonction. Et, plus que jamais, imprimeurà plein temps! Tous les indigènes ont perdu leurs livres durantleurs séjours dans le bush pour échapper aux Japonais pendantl'occupation des îles. " La nouvelle station est un endroit fortagréable. Elle est encore dans le district de Visale, si bien que j'yconnais tout le monde. Tous les adultes ont été jadis mesélèves. Je ne me sens pas du tout parmi des étrangers..." Je vis avec les frères John, Chanel, Andrew. Le PèreScanlon nous sert actuellement d'aumônier. En ce qui concernel'imprimerie, elle a été très bien installée. Lebâtiment est bien aéré et frais. J'y ai beaucoup de place.Grâce à mon séjour en Nouvelle-Zélande, j'ai obtenuune très bonne presse, et tous ses accessoires. Ce sont mes amis deNouvelle-Zélande qui m'ont procuré tout ce matériel, Etc'est également, grâce à de puissantes amitiéslocales, qu'après avoir pu obtenir tout cela il me fut ensuitedonné la permission de l'exporter. Ce ne fut pas une petite affaire !... " Je vous ai signalé la présence du frère Chanel.Sa venue parmi nous a été une aubaine pour la Mission. A la foisingénieur et mécanicien, il est tout à fait l'hommenécessaire pour une mission en reconstruction. A son arrivée,aucun navire n'était en mesure de prendre la mer. Maintenant, le Hambia[la goélette de la Mission] et les pinaces sont en état demarche. Et à combien de jeeps, de camions et de commandcar n'a-t-il pasredonné la vie ! ". Ainsi les presses d'Honiara vont-elles prendrela suite de celles de Rua Sura et de Visale. Dix années encore leFrère George les animera de son ardeur et de sa compétence. Onavait d'abord songé à donner aux indigènes des livresreligieux : lectures de la Bible, catéchismes, prières etcantiques. Maintenant les problèmes d'éducation et d'enseignementprennent le pas. On travaillera même une fois ou l'autre pour legouvernement, au sujet des affaires du Marching Rule : une manifestationsalomonaise du cargo cult aboutissant dans un mouvement pourl'indépendance. Le Frère George est heureux de la tâchequ'il accomplit aux Salomon. Il se réjouit même d'avoirtrouvé des " clients " intéressés par sespublications, les incunables de Guadalcanal et de Malaita. C'est le Juge J. A.Ferguson (1881-1969), un grand bibliophile et bibliographe australien, alorspassionné par les impressions des Nouvelles-Hébrides, qui sembles'être d'abord intéressé aux presses des îlesSalomon. " Mr. Ferguson started early, and I must say that due to his keeninterest he has the best of our press, outside Visale. The Maison Generaliceand Propaganda, in Rome, have been well supplied. The Alexander TurnbullLibrary in Wellington, New Zealand, has also a fair amount. The latest demandreceived, was the Mitchell Library, Sydney. So our productions seem to be infavour for the time being. " Cette lettre était écrite en1939. Le Frère George était fier de pouvoir classer sacollection, à Visale, comme la première au monde. Sagénérosité à l'égard desbibliothèques spécialisées du Pacifique et envers ses amisd'Europe aura au moins permis que ses travaux - en attendant la bombe atomique- - soient conservés en quelques coins du monde demeurés hors.des atteintes des destructions de la barbarie guerrière. Que cettebibliographie constitue comme un petit monument de gratitudeélevé à ce modeste mais efficace serviteur de la culturechrétienne et humaine dans les missions des Salomon, où il devaitmourir, à l'ombre de ses presses, après 48 heures de maladie, le5 janvier 1957. Le flambeau qui tombait de ces mains courageuses fut repris parun de ses collaborateurs, le frère Joseph Chanel Gordon-Howard, unmariste américain arrivé aux Salomon en 1953, mais que sasanté obligera dès juillet 1959 à regagner lesÉtats-Unis. C'est alors le frère Andrew Ayliffe, un australien deTownsville (Queensland) qui reçut en charge l'imprimerie. Il travailleactuellement aidé par le frère Jérôme Hura, unfrère indigène salomonais; deux ou trois compagnons lesassistent. " Nous faisons travailler des invalides ",écrit-il. " L'état de nos presses est plutôtmisérable ces temps-ci, veut bien nous. écrire Mgr Stuyvenberg.Le Frère George avait toujours travaillé avec du matérielde conception ancienne. Le frère australien qui a maintenant la chargede l'imprimerie a acheté d'occasion une machine offset. Mais elle setrouve à l'étroit dans le local que nous avons pu lui accorder.Et nos capacités financières actuelles ne nous permettent pasd'envisager les bâtiments qui nous donneraient la possibilitéd'aller de l'avant. Nous avons même bien du mal à tourner auralenti. " Même son de cloche du côté du frèreAndrew. Il rêvait " de moderniser son matériel et de faire deson imprimerie une sorte d'école professionnelle, qui aurait eu sa placedans le Training Trade Center de Tenaru. Les dégâts causéspar le cyclone de Pâques dans les plantations ont contraintI'Évêque à restreindre les activités accessoires dela mission pour se concentrer sur, l'essentiel ". Par les temps quicourent, même en Océanie, les budgets pour maintenir leuréquilibre doivent comporter des restrictions drastiques! Tels sont lesrenseignements généraux d'ordre historique que nous avons purecueillir pour donner un peu de vie à la liste qui va suivre. Lebouleversement causé par l'invasion japonaise sur le territoire de cesmissions au cours de la seconde guerre mondiale, en détruisant lesarchives locales, a considérablement restreint nos sourcesd'information. Au moins avons-nous pu localiser les presses et savoir qui enavait la responsabilité. On trouvera, dans les notes accompagnant lesentrées du catalogue, toute les données que nous avons pudécouvrir concernant chaque ouvrage en particulier. Patrick O'REILLY etHugh LARACY.

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